Surveiller les travaux pour mieux protéger les Québécois

Samedi, 18 septembre, 2021
Kathy Baig, Présidente de l'Ordre des ingénieurs du Québec, et neufs autres signataires* (dont l'ACQC), La Presse

Le Québec avance, le Québec se développe, le Québec se modernise ! Pourtant, le Québec tarde à adopter certaines des meilleures pratiques de l’industrie dans la réalisation de ses travaux de construction. L’une de ces pratiques consiste justement à obliger ce que ces travaux fassent l’objet d’une surveillance professionnelle étroite et rigoureuse.

Pour garantir que ces constructions soient durables et sécuritaires, à un prix juste, il est impératif de prendre des mesures fortes pour assurer la qualité des ouvrages. Le reportage diffusé le 14 septembre dernier à l’émission La facture de Radio-Canada montre bien les dérives qui nous attendent sans une telle surveillance. Dans le reportage, la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Andrée Laforest, a reconnu que le Québec allait inévitablement en venir à implanter la surveillance obligatoire des travaux de construction. Il s’agit d’une excellente nouvelle. Nous, cosignataires, nous réjouissons de cette reconnaissance et offrons toute notre collaboration à la ministre pour les prochaines étapes.

Regagner la confiance du public

D’après un sondage réalisé par la firme IPSOS en 2020, plus de 85 % des Québécois estiment que le gouvernement devrait changer les lois et les règlements pour rendre la surveillance des travaux obligatoire. Pour eux, il semble évident que refaire des travaux mal exécutés présente un coût élevé pour toutes les parties concernées.
 
Chaque construction comporte son lot de défis. Les surveillants s’assurent que les travaux réalisés sont conformes au plan original, minutieusement préparé en amont par divers corps professionnels. Seule une telle surveillance peut garantir l’utilisation des matériaux prévus aux plans, le respect des normes techniques d’installation lors de la réalisation des travaux, et le respect des codes applicables lors de modifications non prévues.
 

En plus de l’enjeu de sécurité, il faut s’assurer que les citoyens puissent bénéficier de constructions modernes et d’infrastructures de meilleure qualité qui répondent à des normes de plus en plus exigeantes, soucieuses aussi de l’environnement.

Si on souhaite bâtir des infrastructures résilientes et pérennes, à l’image d’un Québec moderne, cela passe nécessairement par une surveillance accrue et obligatoire des chantiers.

Ailleurs au Canada, la surveillance obligatoire est la norme, et l’industrie de la construction y est tout aussi vibrante qu’au Québec.

Une mesure qui favorise le contrôle des coûts

En effet, dans un projet bien planifié et bien géré, la surveillance ne devrait pas occasionner de délais indus si les travaux sont conformes. D’ailleurs, les grands donneurs d’ouvrage publics québécois l’ont compris et intègrent systématiquement cette pratique dans leurs projets. Tous les secteurs de la construction pourraient en bénéficier également. La surveillance des travaux, associée à un entretien attentif, permet de limiter les dépenses qui surviennent après la phase de construction. Comme le soulignait le reportage de La facture, le coût des correctifs entraînés par des vices de construction peut être très important et causer un stress énorme aux ménages qui en sont victimes.

Le Québec traîne la patte

Depuis longtemps déjà, des experts de l’industrie, ainsi que les différents ordres professionnels, demandent aux gouvernements québécois successifs de rendre la surveillance des travaux obligatoire pour les raisons énumérées ci-dessus.

Le Québec vit un renouveau économique qui se traduit par un nombre important de projets de construction dans tous les milieux. Le gouvernement du Québec a tout intérêt à encadrer la surveillance des chantiers afin d’assurer la qualité et la pérennité du bâti que nous léguons aux Québécoises et aux Québécois. Il s’agit bien là d’un enjeu incontournable de protection du public. Le temps est venu pour la législation québécoise de refléter ce changement de culture.

*Cosignataires : Bernard Bigras, président-directeur général de l’Association des firmes de génie-conseil – Québec ; Anne Carrier, architecte, présidente de l’Association des Architectes en pratique privée du Québec ; André Castonguay, président du Réseau québécois des organismes sans but lucratif d’habitation ; Pierre Corriveau, architecte, président de l’Ordre des architectes du Québec ; Jacques Duchesneau, inspecteur général au Bureau de l’intégrité professionnelle et administrative (BIPA) de la Ville de Saint-Jérôme ; Laurent Émery, directeur général du Regroupement des gestionnaires et copropriétaires du Québec ; Marc-André Harnois, directeur général de l’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction ; Johanne Lamanque, vice-présidente, Québec, du Bureau d’assurance du Canada ; Pierre Moses, ingénieur et président de l’Association des ingénieurs municipaux du Québec